Après plusieurs semaines d'un bras de fer entre opposants et forces de l'ordre, Kiev menace de sombrer dans la violence. Depuis mardi soir, au moins cinq personnes ont été tuées dans la capitale ukrainienne, selon des manifestants, dont trois confirmées par le parquet ukrainien. Plus de cent cinquante policiers auraient également été blessés.
Si les rues étaient plus calmes, jeudi 23 janvier, les occupants de la place de l'Indépendance ayant accepté de cesser temporairement les hostilités, les premiers témoignages affluent de brutalités policières et de scènes de torture.
ENLÈVEMENTS ET TORTURE
Le Wall Street Journal évoque notamment le cas d'Ihor Loutsenko, un manifestant qui raconte avoir été enlevé par un groupe d'hommes dans un hôpital avec Yuriy Verbytsky, un autre militant, mardi à l'aube. Après l'avoir retenu prisonnier pendant plusieurs heures, les hommes l'ont abandonné dans la forêt, sans qu'il sache ce qu'il était arrivé à M. Verbytsky. Selon la BBC, le corps de ce dernier a été retrouvé mercredi dans une forêt en dehors de Kiev, portant des signes de torture.
Jeudi soir, la disparition d'un autre leader de l'opposition était signalée à la police. Il s'agit de Dmytro Boulatov, 35 ans, l'un des leaders d'Automaïdan, mouvement de manifestants en voiture qui a organisé plusieurs actions spectaculaires devant la résidence de campagne du chef de l'Etat, devenue un symbole de la corruption. « Il est devenu dangereux d'être militant d'Automaïdan », déclarait ce père de trois enfants dans une récente interview au site d'opposition en ligne Ukraïnska Pravda.
Par ailleurs, Duncan Crawford, de la BBC, a recueilli le témoignage de Mikhail Nizkoguz, un étudiant de 17 ans, qui accuse la police antiémeute de l'avoir traîné dans la rue et de l'avoir torturé en le battant et le poignardant. Son visage et son corps étaient couverts de coupures et de contusions, selon le journaliste. Le jeune homme a expliqué que la police l'avait accusé de tirer des feux d'artifice sur eux alors qu'il ne faisait que prendre des photos. La BBC précise qu'un porte-parole de la police de Kiev avait assuré n'avoir connaissance d'aucun cas avéré de torture.
BERKOUT
Plusieurs vidéos sont également apparues en ligne, témoignant de la violence des forces de police. Dans l'une d'entre elles, on peut voir un homme contraint de poser nu dans la neige devant l'objectif d'un policier, alors qu'une dizaine de ses collègues regardent la scène. La police a présenté ses excuses pour cet « acte inadmissible » et a fait savoir qu'une enquête était ouverte.
Source: Le Monde