"Avec la stagnation des cours des matières premières depuis plus de deux ans, les économistes commencent à s'interroger sur la pérennité de ce qu'ils appelaient le "supercycle" des matières premières.
Ce terme visait à qualifier la hausse spectaculaire des cours à partir de 2004 pour le pétrole, de 2006 pour les métaux industriels et de 2008 pour les produits agricoles. Cette notion renvoyait autant à l'amplitude de la hausse des cours qu'à la durée attendue de cette tendance haussière.
Le "supercycle" a débuté avec la formidable accélération de la croissance économique dans les grands pays émergents. Les cours de matières premières devaient donc continuer à progresser tant que durerait la transformation de ces pays en économies développées. Finalement, le "supercycle" des matières premières ne devait être que l'un des avatars de la mondialisation.
La crise économique, la contraction du commerce mondial et le ralentissement de la croissance chinoise auraient-ils transformé ce "supercycle" avant même qu'il ne devienne "super" ? En effet, si d'aventure cette phase de hausse des cours devait s'arrêter, comme c'est le cas depuis deux ans, elle n'aurait au final duré qu'à peine cinq ou six ans, et ne serait donc pas si différente d'un cycle conjoncturel classique.
Par essence, les "supercycles" sont longs, donc rares. On n'en compte que trois depuis la révolution industrielle. Le premier a duré de 1870 à 1914 et le deuxième de 1946 à 1973, soit des cycles de trois ou quatre décennies. Le troisième est donc celui qui fait débat aujourd'hui.
La prévision la plus structurante pour la poursuite de ce "supercycle" n'est pas tant que la population mondiale passe de 7 milliards d'individus aujourd'hui à 8,5 milliards en 2030, mais surtout que la "classe moyenne" mondiale augmente de 2 à 5 milliards sur la même période. C'est à la satisfaction des besoins en biens etservices collectifs et individuels de ces 3 milliards de nouveaux consommateurs solvables que le secteur des matières premières va devoir faire face".
Source: Le Monde
Frederic Lassere